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Viviane de Beaufort est professeur à l’ESSEC, expert sur les questions européennes, co-directrice du Centre européen de droit et d’économie.

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Cette note vise à présenter les enjeux de l’ouverture des marchés publics internationaux en lien avec les grands contrats pour la France et l’Union européenne. Au-delà d’une approche pédagogique, elle se veut un plaidoyer pour une réforme des pratiques en la matière afin de donner aux entreprises françaises et européennes de meilleures chances dans la compétition mondiale qui, à l’aune de la globalisation, a changé de visage.

 

I/ L’importance des grands contrats dans les exportations de la France

Les grands contrats sont, pour la majorité, des contrats de marché signés dans le cadre d’appels d’offres internationaux avec un pays ou une institution. Les procédures usuelles consistent en des appels d’offres lancés par un état ou l’un de ses démembrements[1] (agences, établissements autonomes gestionnaires de l’infrastructure, opérateurs privés contrôlés par l’état).

Les montants varient considérablement mais sont en général comptés en millions, voire en milliards d’euros et sont essentiellement concentrés sur quelques activités à très forte valeur ajoutée : l’aéronautique, le nucléaire, l’armement, le TGV… « En France, selon la Direction générale du trésor et de la politique économique (DGTPE), qui produit chaque année une analyse sur les grands contrats, une transaction commerciale est considérée comme un “grand contrat” à partir du moment où la part française dépasse 3 millions d’euros[2] ».

L’observation de ce type spécifique d’exportation révèle, pour notre pays, une stabilité relative de 1990 à 2000 avec un montant d’environ 10 Mds d’euros, puis une montée en puissance à 35 Mds d’euros en 2007. Sachant que les montants indiqués ne concernent que la signature du contrat initial, et qu’il faut y ajouter les montants de maintenance et services pour identifier leur importance car un grand contrat signé l’est pour dix, vingt voire trente ans).

L’enjeu des grands contrats, s’il est économique, en raison du poids des grands contrats dans les exportations et de leur impact sur la balance commerciale et sur l’emploi, est également politique car ils constituent un indicateur de l’influence d’un pays dans le monde. Les grands contrats permettent de renforcer les liens entre les deux pays parties au contrat.

Dans un pays comme la France, où ils représentent un élément majeur de nos exportations, les grands contrats ont une valeur symbolique : un échec est bien souvent perçu comme symbolique du déclin industriel de notre pays, le succès étant une vitrine d’un savoir-faire technologique.

Alors que le montant global des grands contrats dans les pays émergents se développe via la multiplication d’appels d’offres internationaux, avec depuis 2000 une croissance annuelle de l’ordre de 25 %, alors que ces appels d’offres sont le plus souvent ciblés sur les « secteurs stratégiques » (où la France est censée exceller), dans la course aux grands contrats, depuis quelques années, les échecs des entreprises françaises semblent se multiplier.

Sans vouloir ici résoudre une question complexe et multidimensionnelle, il apparaît que ces échecs semblent liés à une triple question :

– l’adaptation de l’offre (problématique industrielle) car les performances technologiques françaises ne sont pas toujours adaptées aux besoins des émergents ;

– la maîtrise des outils de l’intelligence économique[3] : selon Henri Guaino[4] « Entre les pays qui ont compris les enjeux de l’intelligence économique et les autres, l’écart se creuse. Le temps presse de prendre le monde tel qu’il est ! » ;

– la qualité du maillage public-privé car entre l’état et les entreprises ; de fait, les contrats internationaux font l’objet de négociations complexes, empruntant à la fois à la négociation commerciale et à la négociation diplomatique.

Autant de questions qui doivent interpeller nos entreprises et l’état[5].

Nota 1

Les appels d’offres internationaux portent sur les secteurs suivants :

– énergie : centrales nucléaires ou hydrauliques, énergies vertes, raffineries ;

– transports : aéronautique civile, lignes de chemin de fer, trains à grande vitesse, autoroutes ;

– équipements militaires : avions, navires, tanks, systèmes d’interception ;

– services : traitement des eaux usées, construction de réseaux d’eau, gestion des déchets ;

– concessions d’exploitation de ressources naturelles (pétrole, gaz, mines).

La structure concurrentielle des secteurs où interviennent les « grands contrats » est de type concentrée : quelques fournisseurs majeurs sont en concurrence dans le monde. Les grands groupes français concernés sont essentiellement : Alcatel, Alstom, Bouygues, EDF, Sagem, GDF-Suez, Technip, Thales, Total, Véolia ou Vinci, leurs succès sont censés compenser une faiblesse structurelle des PME françaises à l’export.

Nota 2

Certains secteurs méritent d’être qualifiés de « stratégiques » en raison de leur caractère sensible pour les politiques nationales. Si la délimitation exacte de ces secteurs peut prêter à discussion, un large consensus existe pour reconnaître que certaines industries jouent un rôle spécifique qui les distingue des activités économiques ordinaires. Un secteur sera considéré comme stratégique lorsqu’il appartient à la sphère souveraine de l’état, c’est l’approche la plus ciblée, celle adoptée par le traité de Lisbonne à l’article 346[6], la notion est liée aux « intérêts essentiels de la sécurité de l’état ». Mais la plupart des états élargissent le spectre en prenant en compte les effets d’entraînement sur l’économie, apparaissent alors dans le périmètre, à minima l’énergie, les réseaux, etc. Ainsi, le champ est mouvant dans le temps et l’espace et quasi impossible à cerner avec une liste figée. Les enjeux sont politiques puisqu’une telle qualification permet à un état de justifier un régime juridique d’exception pour les entreprises concernées quant à sa capacité d’intervention directe ou indirecte[7]. Pour la question, il s’agira d’identifier si les marchés publics sont ouverts ou réservés et de cerner l’intensité de l’appui de l’appareil d’état lors de la négociation des grands contrats à l’international.

Dans la problématique des grands contrats, la dimension juridique reste prégnante et se focalise autour de la problématique de l’ouverture des marchés publics.

 

II/ Quel degré d’ouverture légal des marchés publics ? Le principe de réciprocité et ses déclinaisons

Pour l’Union européenne, cette problématique se pose en termes de réciprocité. En effet, dès lors que certains états tiers réservent leurs marchés publics à des sociétés nationales, alors même que leurs entreprises ont de leur côté accès aux marchés publics des états européens plus ouverts, un déséquilibre concurrentiel est créé.

L’Union européenne pratique, au nom de sa philosophie libérale, l’ouverture des marchés publics, ouverture aux entreprises des états membres mais également à celles d’états tiers : l’établissement de règles strictes de mise en concurrence et d’égalité de traitement en application des règles de l’OMC et du droit communautaire génère, puisque les autres zones du monde ont des positions différentes, un problème de fonds. Les sociétés européennes se voient confrontées à une concurrence sur leurs marchés d’origine et soumises dans le même temps à des restrictions plus ou moins directes à l’accès aux marchés publics d’états tiers.

Revenons sur les règles actuelles prônées en matière de marchés publics internationaux.

2.1. La réciprocité en droit international des marchés publics

Le droit international économique connaît le principe de réciprocité. L’article 28 2) du GATT (General Agreement on Tariffs and Trade / Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce) de 1947, toujours en vigueur aujourd’hui, précise que les états parties s’efforcent de « maintenir un niveau général de concessions réciproques et mutuellement avantageuses ». En 1994, l’accord constitutif de l’OMC réutilise le concept en précisant que les parties sont « désireuses de contribuer à la réalisation de ces objectifs par la conclusion d’accords visant sur une base de réciprocité et d’avantages mutuels, à la réduction substantielle des tarifs douaniers et des autres obstacles au commerce et à l’élimination des discriminations dans les relations commerciales internationales ». Ainsi, même s’il n’y a pas de définition précise du principe de réciprocité dans le droit de l’OMC, les parties, autrement dit les états, souhaitant conserver une autonomie sur la question, l’accord sur les marchés publics dédié à la question est très largement empreint de cette notion.

L’AMP (Accord sur les marchés publics) en vigueur à ce jour date de 1994 et constitue l’annexe 4 des accords de l’OMC. Cet accord spécifique ne concerne que peu d’états parties : hormis l’Union européenne, seuls une douzaine d’états et une vingtaine d’observateurs sont concernés par ce traité. Le nombre des parties a vocation à augmenter puisque tout état membre de l’OMC ou accédant à l’OMC peut devenir membre de l’AMP à des conditions négociées avec les parties à l’accord. La Chine par exemple prépare son adhésion.

Chaque partie qui accède à l’accord est tenue d’assurer la conformité de ses lois, règlements et procédures administratives, ainsi que des pratiques appliquées par les entités concernées, aux termes de l’accord.

L’AMP comprend des dispositions relatives au traitement national et à la non-discrimination pour les fournisseurs et les prestataires de services des états parties. Plusieurs procédures visent à assurer la transparence et une mise en concurrence effective des marchés publics couverts par l’accord ; les mesures discriminatoires sont interdites et le système de règlement des différends de l’OMC s’applique à l’AMP. Selon les termes du traité, pour les marchés qui entrent dans le champ d’application de l’accord, les parties sont tenues d’accorder aux biens et services provenant d’un fournisseur ou d’un prestataire d’une autre partie un traitement « qui ne sera pas moins favorable » à celui accordé aux fournisseurs et prestataires nationaux.

Les états signataires se sont mutuellement engagés à réserver aux agents économiques étrangers le même accueil que celui réservé aux agents nationaux au nom du principe de réciprocité. Le principe de réciprocité constitue donc la pierre angulaire de cet accord et en même temps une pierre d’achoppement entre les différentes parties, tout particulièrement en temps de crise, période pendant laquelle les états ont traditionnellement tendance à renforcer leur protectionnisme.

De fait, le principe de réciprocité connaît un certain nombre d’exceptions dont les états parties usent et parfois abusent.

– Exception liée à la différence de développement.

Une exception à la réciprocité entre les pays développés et les pays non développés est sanctuarisée à la partie IV du nouvel accord général portant sur le commerce et le développement : « Les parties contractantes n’attendent pas de réciprocité pour les engagements pris par elles dans les négociations commerciales de réduire ou d’éliminer les droits de douanes et autres obstacles au commerce des parties contractantes peu développées ». L’accord sur les marchés publics tempère ainsi l’application du principe du traitement national en permettant à certains états parties de négocier un aménagement acceptable à la règle du traitement national ; on parle de traitement différencié. Ce traitement est en principe transitoire, l’objectif étant à terme d’accéder au régime général (article 5 §4).

– Exception défense.

Une seconde exception prévue à l’article 23 autorise les parties à déroger aux principes de traitement national, transparence et non-discrimination, lorsque cela apparaît nécessaire à la protection de leurs intérêts et de leur sécurité. Les marchés concernés sont ceux de la fourniture d’armes, de munitions, de matériels de guerre et tous autres achats indispensables à la sécurité et à la défense nationales. Cette exception est cependant encadrée et ne peut être le siège de restrictions déguisées. Voir notamment pour le droit de l’Union européenne, l’article 346.

– Aménagements ou réserves à l’AMP :

Enfin, les états parties se sont octroyés, vis-à-vis de l’application du traité, le droit d’émettre un certain nombre de réserves ou de réduire son champ d’application sectoriel. Par exemple :

– pour les états-Unis, les General Notes de l’appendice 1 à l’AMP prévoient que l’accord ne s’applique pas aux marchés réservés aux petites et moyennes entreprises (voir le Small Business Act) ;

– pour le Canada : les General Notes de l’appendice 1 à l’AMP prévoient de très larges dérogations excluant certains secteurs du champ d’application de l’accord : domaines de la construction navale, des chemins de fer urbains et matériels de transport urbain, de certains marchés de produits agricoles, marchés réservés aux petites entreprises.

L’accord AMP, tel qu’il est et tel qu’il est appliqué, constitue donc une ouverture limitée aux marchés publics internationaux encore peu respectueux du principe de réciprocité. Or, l’Union européenne a adopté un comportement vertueux espérant créer un effet d’entraînement…

2.2. La réciprocité en droit de l’UE

Le parti pris des autorités communautaires est la libéralisation des échanges. La commande publique des états membres ne peut pas échapper à de telles règles sans mettre à mal les objectifs communautaires de non-discrimination, de liberté et de transparence. C’est pourquoi l’Union européenne a, d’une part, établi peu d’exceptions à l’AMP. Celles-ci restent ciblées et d’application stricte, à l’inverse des autres parties à l’accord : les dérogations ne concernent que certains marchés et s’appliquent à l’encontre des seules parties ne respectant pas les engagements de l’AMP : ces exceptions visent pour l’essentiel les états-Unis, le Canada, Israël, la Corée du Sud et le Japon. L’Union européenne prévoit par ailleurs un retour à l’ouverture, dès que les états visés par ces exceptions assurent l’accès de leurs marchés aux fournisseurs et prestataires de services de la CE, et se tient à ce principe scrupuleusement.

La décision du Conseil de décembre 1994[8] ratifie l’Uruguay Round dans tous ses éléments. C’est ainsi que depuis son entrée en vigueur, le 1er janvier 1996, l’AMP est partie intégrante du droit communautaire. Dès lors, l’entière application de l’AMP est assurée même en l’absence de tout autre instrument juridique communautaire et les pouvoirs adjudicateurs doivent se conformer aux exigences de l’AMP.

D’autre part, l’UE a instauré une législation communautaire ambitieuse sur la question, par voie de directives sur le territoire de l’Union européenne.

Nota 3 Directives AMP

Les directives communautaires, qui mettent en place l’ouverture des marchés publics en Europe, ne traitent pas directement de la relation entre fournisseurs tiers issus de parties à l’AMP (hors UE) et pouvoirs adjudicateurs européens. L’UE n’ayant, à ce stade, pas souhaité mettre en place une préférence communautaire généralisée, ceux-ci sont régis par les mêmes dispositions que leurs homologues de l’Union européenne : directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services (article 5) et directive 2004/17/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux (article 12).

 

Nota 4 L’effet direct ou non de l’AMP

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) ne reconnaît pas aux accords du GATT, puis de l’OMC la possibilité d’être invoqués devant elle (depuis l’arrêt International Fruit Company[9] et de jurisprudence constante). Ce refus est fondé au regard « à la fois [de] l’esprit, l’économie et les termes de l’accord » : « souplesse des dispositions » et « possibilités de dérogation » indiquent que les parties n’ont pas souhaité « l’effet direct » des dispositions de l’AMP. La décision du 22 décembre 1994 relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords des négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay (1986-1994), JOCE L336/1, 23 décembre 1994 et les directives relatives aux marchés publics (2004/17/CE et 2004/18/CE) sont explicitement opposées à un effet direct. Cependant, la jurisprudence Fédiol[10], qui reconnaît un effet direct à des « dispositions précises des accords et des mémorandums figurant dans les annexes de l’accord OMC » auxquelles « un acte communautaire renvoie expressément » (point 54), provoque une situation d’insécurité juridique. Au sujet de l’AMP, dont tous les commentateurs s’accordent à dire qu’il se démarque des autres annexes à l’accord de Marrakech par sa précision, le juge devra donc déterminer si la précision de ses dispositions suffit à prouver l’intention du législateur de leur donner un effet direct, malgré les dénégations de celui-ci.

2.3. Une réciprocité à établir sur des bases bilatérales ?

Les accords de libre échange (ALE) s’insèrent dans le cadre de l’OMC en instaurant une coopération commerciale renforcée entre les parties contractantes. En 2008, l’OMC recensait environ deux cents traités dits ALE, concentrés principalement aux états-Unis et dans l’Union européenne. Ces traités établissent généralement une coopération étendue entre les parties, aussi bien dans des matières dont il est traditionnellement question à l’OMC (antidumping, biens industriels et agricoles), que dans d’autres domaines (la protection de l’environnement, la concurrence…). Les marchés publics sont évoqués dans une très grande majorité des traités bilatéraux signés. Cependant, les résultats diffèrent : selon une étude de l’Institut Bruegel, sur vingt-huit ALE étudiés (quatorze pour les états-Unis et quatorze pour l’UE) l’accès aux marchés publics est évoqué dans tous les ALE signés par les états-Unis, tous sauf un étant juridiquement contraignant, tandis que pour l’UE, sept seulement sur quatorze le sont.

La récurrence du traitement de la question des marchés publics révèle son importance, alors même que ces traités n’ont pas été négociés et signés à la même époque. Le contexte actuel renforce le caractère stratégique de la question de la réciprocité dans les marchés publics[11].

L’exemple de l’approche duale des états-Unis en matière de marchés publics

La politique de marchés publics américaine tient en une double approche. La première consiste à cloisonner le marché national, la seconde consiste à se rapprocher d’états partenaires afin d’offrir de nouveaux accès aux sociétés américaines à la commande publique d’autres états. Les états-Unis sont de fervents adeptes du patriotisme économique. Dès 1933, le législateur réduit les possibilités de recours à l’export grâce au Buy American Act, auquel vient s’ajouter le dispositif du Small Business Act de 1953, qui impose de rendre accessible les marchés publics aux PME américaines. L’agence de régulation du même nom (Small Business Administration) assure annuellement l’accès des PME aux marchés publics en fixant les pourcentages que chaque administration doit leur réserver ; en outre, l’agence met en place des politiques et programmes pour faciliter et organiser l’accès de petites entreprises aux marchés publics. Les mesures phares de la loi sont au nombre de quatre. Il s’agit de réserver aux PME les marchés aux faibles montants (moins de 100 000 US$), réserver aux PME les marchés pour lesquels au moins deux PME peuvent proposer une offre satisfaisante, réserver aux PME une partie des grands contrats et pour les plus gros contrats obliger les grandes entreprises à proposer un plan de sous-traitance aux PME. Le résultat est très efficace puisque plus de 20 % des marchés publics sont attribués directement à des PME, sans compter leur participation aux autres marchés publics dans lesquels ils interviennent en tant que sous-traitants.

Récemment, d’autres textes normatifs sont venus réduire l’ouverture des marchés publics, le dernier en date est issu de l’immense plan de relance de l’économie américaine de mars 2009 : le Buy American (Recovery and reinvestment Act) qui inclut des dispositions de type Buy American accentuées. En substance, le texte impose aux sociétés qui disposent d’un soutien fédéral de ne pas faire appel à un agent économique extérieur à la fédération. Plus précisément, pour les travaux d’infrastructures les achats d’aciers doivent être passés auprès de fabricants américains. D’abord cantonné au secteur sidérurgique, le plan a été étendu à tous les projets d’infrastructures.

Le second volet de la politique de marchés publics américaine peut paraître contradictoire avec le premier volet (cloisonnement du marché national). Les états-Unis utilisent tous les leviers pour rendre les marchés publics des pays tiers accessibles aux sociétés américaines. Les états-Unis sont partie à l’AMP, toutefois, comme cela a été précisé, la note générale 1 de l’appendice 1 apporte de sérieuses restrictions à son application sur le territoire américain. Les états-Unis n’appliquent donc qu’à la marge l’AMP et celui-ci, à défaut d’une application généralisée, est une sorte de référence dans les conventions bilatérales. Ainsi, plusieurs traités bilatéraux évoquent l’AMP et les parties s’engagent parfois à l’utiliser sans restriction à leurs échanges. le traitement national est un engagement pour l’accès aux marchés publics (celui avec Israël évoque l’élimination des restrictions aux marchés publics).

Un cas particulier est à mentionner : l’accord avec le Canada

Tout récemment, le 12 février 2010, le Canada et les états-Unis ont scellé leur volonté d’ouvrir mutuellement leurs marchés publics[12]. Les stipulations tournent autour de l’AMP mais en l’élargissant de façon importante. Trois éléments essentiels doivent être retenus : les deux parties reconnaissent un accès mutuel aux marchés sous-souverains (des collectivités territoriales au Canada et intra-étatique aux états-Unis) et un accès aux sociétés américaines aux projets canadiens en échange de l’exemption partielle de l’application du programme Buy American du Recovery and Reinvestment Act de mars 2009 pour les sociétés canadiennes. Enfin, ce traité instaure une étroite collaboration pour l’ouverture grandissante de leurs marchés publics respectifs, bien au-delà des stipulations du NAFTA[13] d’une part et de l’AMP d’autre part.

Si la dimension juridique de l’ouverture des marchés publics est fondamentale et s’il est important de continuer à promouvoir des améliorations à venir (voir partie III), d’autres dimensions « cachées » interviennent pour restreindre l’accès à ces marchés d’état ou le rendre compliqué ou stratégiquement risqué : exigences de transfert de technologies, barrières techniques, compensations.

2.4. Des barrières non tarifaires

Nota 5 L’existence de barrières non tarifaires

L’utilisation excessive des exclusions et dérogations à l’accord sur les marchés publics, dont les clauses de sécurité, procédures complexes d’enregistrement en tant que « fournisseur agréé », manque d’informations et de transparence dans les procédures d’appels d’offres et d’attribution des marchés, exigences excessives en termes de contenu local, etc. constituent des mesures discriminatoires. Face à cette concurrence déséquilibrée, la réciprocité d’ouverture des marchés publics seule permet de rétablir une concurrence équitable pour les entreprises européennes. Est souhaitable une déclaration officielle de la Commission européenne clarifiant les conditions dans lesquelles les entités adjudicatrices peuvent appliquer la « clause de réciprocité » figurant dans les Notes générales de l’UE de l’accord sur les marchés publics.

– Transferts de technologies, le prix à payer

Lorsque du matériel de très haute technologie est vendu à un pays étranger, le fournisseur est désormais obligé de faire un transfert de technologie. Le « package » inclut la plupart du temps des transferts technologiques, partie intégrante de l’offre remise au client et permettent de différencier une offre. Dans la concurrence internationale, la technologie est un avantage essentiel des pays du Nord, aux économies plus intensives en capital et à plus forte intensité technologique, face aux pays du Sud, qui s’appuient traditionnellement sur leurs faibles coûts de main-d’œuvre. Mais, précisément, la montée en gamme des industries du Sud s’appuie sur des technologies transférées par les pays industrialisés. L’industrie nucléaire sud-coréenne s’est ainsi développée grâce à des transferts technologiques français ou américains qui lui permettent aujourd’hui de concurrencer les pays du Nord sur les marchés émergents. Même si les réacteurs coréens sont moins avancés techniquement, ils profitent d’une technologie aux coûts de développement amortis qui, couplée avec un coût du travail plus faible, les rendent plus compétitifs. Le même phénomène semble se répéter avec les trains à grande vitesse chinois ou les éoliennes : initialement développés de manière autonome, ils ont été finalement conçus en s’appuyant presque totalement sur les transferts de technologie qui avaient été exigés des industriels européens, japonais ou canadiens par les Chinois pour l’obtention de marchés locaux. La question du transfert technologique est donc sensible et ne concerne pas uniquement l’entreprise transférant son savoir-faire technique. Ce transfert peut avoir des implications stratégiques ou de sécurité intérieure pour l’état exportateur, particulièrement pour les équipements militaires. Cela explique le refus des Américains, en général, de procéder à des transferts de technologie (F-18 dans le cas du Brésil). Ces paramètres économiques (prix, qualité du produit, transfert technologique) sont souvent les principaux arguments utilisés pour justifier le choix final des autorités acheteuses. Or, la détention d’une technologie est l’aboutissement de plusieurs années de recherche et de développement.

Faut-il accepter cette logique et jusqu’où ? Qu’est-ce qu’un transfert de technologie, raisonnable ? Question qui se double d’un problème de sécurité en cas de contrefaçon car ayant pris conscience de la réticence des pays de la triade à transférer certaines technologies, la Chine n’hésite pas, comme elle l’a fait pour l’Airbus A 380 qu’elle a acheté, à désosser l’appareil pour en connaître les « secrets ». On aura en tête l’accident du Concorde à Gonesse le 25 juillet 2000 causé, selon l’expertise, par une pièce défaillante : lamelle métallique contrefaite par des Chinois, à partir d’une lamelle d’un DC 10 de la Continental Airlines et commercialisée sur le marché noir.

– Préférences nationales

Les mesures de relance adoptées par certains états se sont accompagnées de tendances protectionnistes prononcées dans le domaine des marchés publics[14].

En Chine, par exemple, les acheteurs publics ont reçu l’instruction d’appliquer à la lettre la préférence domestique prévue par la législation chinoise des marchés publics et ont eu tendance à excéder les provisions de la loi. Se développent en outre des politiques discriminatoires spécifiques dans le domaine des hautes technologies de l’information et de l’environnement (Indigenous Innovative Procurement Scheme), pouvant bloquer l’accès des marchés les plus prometteurs aux entreprises.

Aux états-Unis, autre exemple, l’American Recovery and Reinvestment Act of 2009 17 February 2009[15] stipule :

* « Section 604 of the ARRA requires the Department of Homeland Security (DHS) to procure US-manufactured textile and apparel goods, subject to certain exceptions » ;

* « Section 1605 requires that only US-produced iron, steel and manufactured goods be used in public buildings and public works funded by the ARRA, small business act US »

– Répartition des pouvoirs entre entités adjudicatrices, état fédéral et pouvoirs locaux

Exemple : le Canada (voir World Trade Organization GPA/51 – 18 June 2001 (01-3018) – Committee on Government Procurement – Review of National Implementing Legislation – Canada).

– Utilisation de l’exception de sécurité (exemple Japon / secteur des trains)

– Exigences en contenu local

L’Afrique du Sud ainsi impose une localisation importante d’activités alors même que, le plus souvent, le personnel n’étant pas qualifié, il est extrêmement compliqué pour la société répondant à l’appel d’offres d’organiser cette localisation.

2.5. Les compensations ou offset, outil légal de négociation dans les grands contrats

Les compensations internationales ou offsets sont des obligations imposées par le gouvernement d’un pays donné lorsque celui-ci (ou toute autre entité publique du même pays) est amené à signer un grand contrat relatif à un marché public avec une société étrangère et à l’issue d’un appel d’offre international.

Les domaines soumis aux offsets sont, entre autres, les acquisitions d’infrastructures dans les secteurs de l’énergie, de la défense, de l’aéronautique ou des transports. Les offsets imposent à la société étrangère ayant remporté l’appel d’offres de créer de la valeur ajoutée nationale dans le pays de son client comme condition de la signature du contrat principal, et ce afin d’encourager le développement industriel local ou de contribuer au rééquilibre de la balance des paiements.

Les compensations sont un outil de droit prévu par les accords de Marrakech : un article spécifique prévoit en effet un traitement différencié pour les pays en voie de développement (apte ainsi à rattraper les pays de l’OCDE). Les compensations, outil diversement utilisé par les états en développement (champ d’activité plus ou moins large, exigence légale du contrat ou simple dimension de la négociation contractuelle…) ou par les états développés dans le secteur « défense » peuvent constituer une condition de la réussite de la négociation.

Nota 6 Enjeux relatifs aux offsets

Ces enjeux sont considérables et peuvent se présenter sous trois niveaux.

La naissance d’une obligation

Une obligation d’offset est matérialisée par un contrat appliqué en parallèle à celui fixant les conditions de la vente de l’équipement ou des infrastructures achetés par le client, ou contrat principal. La signature du contrat principal est souvent soumise à la condition de la signature préalable du contrat offset. Ce contrat offset exprime une valeur monétaire, elle-même fonction de la valeur du contrat principal – de l’ordre de 30 % pour les contrats du domaine civil, en moyenne 100 % pour les contrats défense. Le fournisseur s’engage, par sa signature, à créer directement ou indirectement une valeur ajoutée équivalente à ce montant dans le pays de son client.

Le contrat offset fixe par ailleurs les délais, conditions et procédures à suivre vis-à-vis des autorités locales compétentes pour évaluer l’éligibilité et constater la mise en œuvre des projets permettant de compenser cette obligation.

Compensation et coût d’une obligation d’offset

La compensation d’une obligation d’offset implique la mise en place de projets spécifiques visant à créer de la valeur ajoutée dans le pays du client. Chaque projet doit être approuvé avant sa mise en œuvre par les autorités offset compétentes du pays. La valeur ajoutée effectivement créée, éventuellement multipliée par un coefficient en fonction du contenu du projet, génère des « crédits d’offset » venant compenser la valeur monétaire de l’obligation.
Pour l’obligataire, l’objectif est de créer un maximum de valeur ajoutée locale pour un coût minimum. Ce coût est évalué en amont, au moment de la réponse à l’appel d’offre, et implicitement pris en compte dans le prix de vente. La provision offset doit être suffisante pour couvrir les coûts impliqués par l’obligation d’offset sans réduire la compétitivité de l’offre.

Les pénalités en cas de non-respect d’un contrat offset

Comme tout contrat commercial, le contrat offset prévoit des pénalités en cas de non-respect de ses termes. Ces pénalités s’expriment en fonction de la valeur du contrat principal, et impliquent souvent l’émission d’une garantie bancaire. La non-compensation totale ou partielle d’une obligation d’offset a donc un impact potentiel direct sur la marge réalisée sur le contrat principal ou sur la compétitivité de l’obligataire. Certains pays peuvent par ailleurs choisir d’écarter de leurs consultations futures un fournisseur ne respectant pas un contrat offset.

Les sociétés peuvent adopter quatre types de comportements face à ces obligations :

Défensive : les sociétés ne font pas officiellement de compensation, toutefois, elles recherchent des arrangements avec les pays acheteurs. Ces sociétés oublient les compensations contractuelles mais, la plupart du temps, vendent leurs produits sans marge, voir avec pertes.

Passive : les sociétés avec des stratégies passives participent aux compensations à un niveau minimum sur une base ad hoc. Certaines ont cette attitude car elles proposent des produits uniques sans ou avec très peu de compétition.

Réactive : les sociétés avec une stratégie réactive coopèrent avec le pays acheteur et répondent favorablement aux exigences de compensations. Elles utilisent les compensations comme un outil concurrentiel en se basant sur la théorie qui consiste à refuser toute vente sans proposition.

Proactive : les entreprises qui ont adopté une stratégie proactive font des compensations un engagement commercial et stratégique. Elles les utilisent comme outil marketing, sur lequel elles ont un regard opportuniste, à la place d’une attitude négative, afin d’accroître le volume des ventes sur un secteur de développement durable.

Christian Sylvain (expert associé au CEDE), Atelier CEDE du 10 juin 2010

III/ La nécessité d’une révision des règles d’accès aux marchés publics internationaux

Le principe de réciprocité doit pouvoir être appliqué car des asymétries de fait nuisent à la compétitivité des entreprises européennes : alors que celles-ci se conforment aux règles du marché et sont contrôlées, des compétiteurs d’autres contrées profitent d’interventions étatiques plus ou moins affichées qui aménagent les règles internationales à leur avantage en faussant la donne. La réciprocité est un principe destiné à instaurer la loyauté et l’équité dans les relations économiques, une application plus systématique de ce principe, déjà énoncé en droit européen (directive sur les OPA, exception au libre accès des marchés publics…), mais manifestement peu utilisé, permettrait de jouer la partition d’une ouverture régulée.

La multiplication récente des instruments juridiques relatifs aux marchés publics démontre, qu’à travers le monde, les marchés publics sont encore loin de l’ouverture souhaitée par l’AMP, mais que les états sont conscients de l’importance de l’enjeu que cette ouverture représente.

L’Union européenne a intérêt à agir de manière plus offensive sur cette question. Fin 2006, le rapport de la commission Global Europe – competing in the world a abouti à encourager au développement de relations bilatérales entre l’UE et des pays tiers, notamment avec les partenaires asiatiques ; il s’agit de faire preuve d’une plus grande fermeté quant aux conditions d’accès aux marchés publics.

3.1. Révisions de l’AMP[16]

L’article 24 de l’actuel AMP engage à poursuivre les négociations dans le but d’améliorer l’efficacité du traité. Sur cette base, fin 2006, des négociations à l’OMC ont abouti à l’établissement d’une proposition de révision de l’AMP : WTO 11- GPA/W/297- 11 décembre 2006, qui comporte notamment des précisions sur les spécifications techniques et les cas d’offres limitées afin de réduire les contournements au principe d’ouverture d’accès.

Le texte élaboré et sur lequel se sont accordés les négociateurs en 2006 est provisoire et son succès largement subordonné à l’élargissement de la couverture de l’AMP par les parties : si la proposition de la Commission européenne de février 2008 représente près de 85 % des marchés publics européens concernés, un certain nombre de signataires de l’AMP (les états-Unis, le Canada et le Japon principalement) excluent encore de la couverture de l’AMP les entités contractantes du niveau sous-central. L’autre question difficile est la suppression de mesures discriminatoires, telles que la pratique des marchés publics réservés aux PME nationales (états-Unis, Japon, Corée du Sud) ou la suppression des « exceptions spécifiques », qui rendent inaccessibles, en pratique, des marchés théoriquement couverts par l’AMP (par exemple la clause de sécurité opérationnelle des marchés publics ferroviaires japonais).

3.2. Nouvelles orientations de l’UE

La Commission, consciente de pressions concurrentielles accrues sur les entreprises des états membres, a la préoccupation de rééquilibrer les engagements de l’UE :

–       L’UE s’efforce d’inclure un chapitre « marchés publics » dans les ALE bilatéraux[17]. Ces chapitres visent l’adoption par nos partenaires commerciaux de règles de transparences conformes aux standards internationaux (AMP) et des engagements en matière d’accès au marché sur une base de réciprocité. Les efforts se focalisent en particulier sur l’accès aux marchés publics passés par les opérateurs de services publics en réseau (énergie, eau, transports collectifs ou infrastructures portuaires et aéroportuaires) dans lesquels les entreprises européennes ont une expertise particulière.

–       Conclusion du « round » actuel de l’AMP : les négociations se poursuivent au sein du Comité des marchés publics de l’OMC. Lors de l’accord provisoire sur le texte de décembre 2006, les négociations ont été centrées sur l’amélioration de l’accès au marché. À la suite du peu d’engagement des autres parties et le maintien d’importantes restrictions dans l’accès au marché, l’UE a déposé en 2007 une offre révisée dont l’objectif principal est d’œuvrer à un rééquilibrage à l’encontre des parties maintenant ces restrictions significatives.

–       Une relance de la négociation semble possible : la plupart des parties visent un accord pour 2011, les états-Unis et le Canada ont ainsi proposé de faire bénéficier les autres membres de l’AMP de leur accord bilatéral. L’UE est prête à contribuer significativement aux discussions sur l’augmentation de couverture. Toute clarification de la législation commerciale dans le domaine des marchés publics et des instruments, qui permettrait d’avoir plus de marge de manœuvre dans les négociations commerciales, doit se faire a priori sur la base de l’article 207 du traité du fonctionnement de l’UE.

Nota 7

L’article 207 étend les compétences exclusives de l’Union européenne et associe le Parlement européen dans le cadre de la procédure législative ordinaire. Un avis conforme du PE est requis pour les accords internationaux intervenant entre l’UE et les pays tiers dans le cadre d’accords multilatéraux ou bilatéraux : l’article 218.6.

Cette nouvelle procédure a été appliquée pour l’accord avec la Corée du Sud en 2010.

Un contexte favorable à une approche plus offensive ?

Le rapport Monti de mai 2010 prône une approche plus offensive : « Europe needs to better match actions to expand the competitiveness space for its firms and efforts to level the global regulatory playing field. The common commercial policy gives the EU the power and the right tools to act effectively on the global stage. Europe should use these tools to defend and promote its interests in an active, determined way vis-à-vis its trading partners, to ensure trade access and to foster regulatory convergence… » De même que les différentes communications de la Commission, notamment celle du 23 août 2010 « Single Market Act- A single market delivering smart, sustainable and inclusive economic growth » ou les conclusions des récents Conseils européens.

Un exemple vertueux : l’ALE UE-Corée du Sud

L’Union européenne vient de signer un nouvel accord de libre échange avec la Corée du Sud. En matière de marchés publics, les négociations ont abouti à une nouvelle forme d’accord sur la question. Dans la plupart des ALE de l’Union européenne, la question des marchés publics est évoquée de façon directe sans référence à aucun autre, dans l’ALE UE-CS la démarche est différente, les parties s’accordant pour se référer directement à l’AMP. Plus précisément, il faut retenir trois points centraux :

  1. Le traité rappelle d’abord que les parties réaffirment leur attachement à l’AMP de 1994 en s’efforçant d’élargir son application à travers le monde.
  2. Pour les marchés publics qui les concerneront, les parties appliquent la version provisoire révisée de l’AMP, datée du 19 novembre 2007.
  3. Au-delà des différentes acceptions des marchés publics, les parties s’entendent sur la notion de concession (avec une définition respective pour chaque partie) et leur appliquent, entre autres exigences procédurales, le régime de non-discrimination et du traitement national. L’annexe 9 leur est réservé. La référence aux textes internationaux en matière de marchés publics (l’AMP et sa révision) marque clairement l’intention des parties de s’engager juridiquement quant à l’accès réciproque de leurs marchés publics.

Un potentiel intéressant les négociations sur le Canada[18]

Des négociations sur un « vaste accord économique et commercial » sont en cours depuis le 6 mai 2009. Cet accord inclura un chapitre sur les marchés publics qui prendra comme base de départ le texte provisoire de l’AMP de novembre 2006. Le champ d’application visé par la Commission est l’ensemble des marchés publics aux niveaux central et sous-central, « dans tous les domaines, y compris celui des services d’utilité publique ». Il n’y a pas encore de date prévue pour la conclusion de l’accord.

Pour aller plus loin :

Sites :

www.wto.com

www.eurlex.europa.eu

Viviane de Beaufort et édouard Simon, De l’effet direct de l’accord AMP, CEDE, juin 2010.

Viviane de Beaufort (dir.), avec Patrick Dupuis et édouard Simon, « Synthèse libre du CEDE » Europe et mondialisation », colloque du 28 janvier 2010.

B. Carayon, « À armes égales », Rapport sur l’intelligence économique, remis au Premier Ministre, septembre 2006.

Henrik Horn, Petros C. Mavroidis et André Sapir, Beyond the WTO ? An anatomy of EU and US preferential trade agreements, Bruegel Institute, 2009.

« Les secrets des appels d’offres internationaux – Appels d’offre internationaux », Géo-économie, revue trimestrielle, hiver 2009-2010.

« Les “Grands Contrats” signés par les entreprises françaises dans les pays émergents », Trésor-éco, no 34, avril 2008, Direction générale du trésor et de la politique économique, ministère de l’économie.

Marc Poulain, Contribution à l’atelier Grands Contrats, Commission européenne – DG Trade, mai 2010.

Hubert Védrine, Rapport pour le président de la République sur la France et la mondialisation, septembre 2007.


[1] Même s’il peut y avoir un grand contrat intervenant avec un acteur privé pour la vente des TGV ou des Airbus, etc.

[2] « Les “Grands Contrats” signés par les entreprises françaises dans les pays émergents », TrésorÉco, no 34, avril 2008, Direction générale du trésor et de la politique économique, ministère de l’économie.

[3] Selon éric Delbecque et Christian Harbulot, l’intelligence économique consiste en la maîtrise et la protection de l’information stratégique utile aux acteurs économiques. Elle se décompose en action de veille (sur les concurrents, les marchés, les technologies et les stakeholder), en dispositifs de sécurité (des actifs et de l’information stratégique) et en opération d’influence (dans les lieux de décision nationaux et/ou internationaux, dans les enceintes productrices de normes, auprès des leaders d’opinion).

[4] Henri Guaino, « Intelligence économique : le retard français », Les échos, 10 décembre 2002.

[5] Ces thèmes font l’objet d’analyses dans les travaux du CEDE avec IRENE-ESSEC.

[6] Article 346- ex 296 ex 223 :

Les dispositions du présent traité ne font pas obstacle aux règles ci-après :

a) aucun État membre n’est tenu de fournir des renseignements dont il estimerait la divulgation contraire aux intérêts essentiels de sa sécurité,

b) tout État membre peut prendre les mesures qu’il estime nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité et qui se rapportent à la production ou au commerce d’armes, de munitions et de matériel de guerre ; ces mesures ne doivent pas altérer les conditions de la concurrence dans le marché commun en ce qui concerne les produits non destinés à des fins spécifiquement militaires.

2°) Le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission, peut apporter des modifications à la liste, qu’il a fixée le 15 avril 1958, des produits auxquels les dispositions du paragraphe 1, point b, s’appliquent.

[7] Ateliers nos 1, 2, 3 du CEDE – 2009- cede-essec.fr

[8] Décision no 94/800/EC du 22 décembre 1994.

[9] CJCE, arrêt International Fruit Company c/ Commission, 12 décembre 1972.

[10] CJCE, arrêt Fédiol, 22 juin 1989.

[11] Voir rapport de l’OMC sur les restrictions au commerce 2009-2010, dont le CEDE a réalisé une synthèse.

[12] Agreement between the government of Canada and the government of the United states of America on government procurement.

[13] The North American Free Trade Agreement.

[14] Voir rapport de l’OMC sur les mesures de l’état 2009-2010 et synthèse du CEDE.

[16] Réalisé à partir du rapport de la Commission relatif aux négociations concernant l’accès des entreprises de la Communauté aux marchés des pays tiers dans les domaines couverts par la directive 2004/17/CE (COM/2009/0592).

[17] Exemples : accord de partenariat économique, de coordination politique et de coopération avec le Mexique (2000), accord d’association avec l’Ukraine, accord de partenariat économique avec treize des pays de l’union régionale CARIFORUM (2008), accord économique et commerciale global avec le Canada, accord d’association avec l’union régionale MERCOSUR, accord d’association avec les états de la Région d’Amérique centrale (paraphé en 2010 – non encore signé ou ratifié), accord de libre échange avec la Corée du Sud (2010 non encore ratifié)…

[18] Ibid.

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À propos de l'auteur

Viviane de Beaufort

Professeur , Département Droit et Environnement de l'Entreprise
Co-Directeur du Centre Européen de Droit et d'Economie - Co-Directeur du "cursus droit" ESSEC - Directeur Académique du programme "Entreprendre au Féminin".
Elle travaille et publie sur les questions européennes : gouvernance publique, processus institutionnel de l'Union européenne , lobbying ; participe à la réflexion politique au sein de plusieurs "thinks tanks". Expert en droit des affaires européen (concurrence, fusions, droit des sociétés et corporate governance, RSE, OPA et prises de contrôle, politiques communes (commerce- industrie -entreprise). Elle co-dirige le Centre europeen de Droit et d'Economie. Impliquée dans le Women's Forum, elle est directeur des programmes WOMEN : "Entreprendre au Féminin" / Women be european board ready / ELLE-ESSEC et mène des travaux sur les questions de genre dans le cadre d'un engagement de longue date auprès du Women's Forum et des réseaux féminins.Elle est membre actif de nombreux think tanks et réseaux.